La présidente Aubry !
Acte I scène 2
La représentation à l'Hôtel de Bourgogne ne va pas tarder à être annulée. Que vont faire la présidente Aubry - Françoise de Villandry - et ses amies ? Suivons nos Précieuses alors qu'elles descendent vers la Seine, jusqu'à la rue Saint-Thomas du Louvre.
On les retrouve à l'Hôtel de Rambouillet. Bordé par les remparts de l'ancienne enceinte de Charles V, il s'ouvre aussi rue Saint-Honoré. La cour résonne d'allées et venues ; nous sommes là au c?ur de la vie intellectuelle. Madame de Rambouillet, Arthénice pour ses amis, anagramme de son prénom Catherine, vous l'aurez remarqué, reçoit dans sa chambre bleue. Elle est allongée, belle et spirituelle, le corps malade mais l'esprit en alerte. Dans la ruelle, de chaque côté de son lit placé en face de la fenêtre, se pressent gens de lettres, savants et philosophes? A l'hôtel de Rambouillet, pour avoir accès à la chambre bleue, nul quartier de noblesse n'est demandé, mais un véritable brevet de ton est exigé. Ici aussi, l'esprit cède le pas à la naissance.
Vite ! Voiturez-nous ici les commodités de la conversation ordonne Madelon à son valet Almanzor. Sacré Molière ! Quelle réputation avez-vous fait aux Précieuses ! Je suis votre serviteur mais franchement, vous leur avez taillé un costume aux couleurs de Baise-moi ma mignonne, voire de Ventre-de-Biche ou, pire, d'Espagnol malade ! On rit bien de la farce, et on vous pardonne volontiers, mais, ne vous en déplaise, ici, se pratique l'art de la conversation, et certainement pas celui de la pédanterie, et encore moins celui du bavardage. Ici seuls comptent l'agilité de l'esprit, le sens de la formule, l'envie d'apprendre, l'habileté à discourir sur un sujet imposé, le goût de la beauté et du raffinement? Chacun se délecte des lettres qui circulent dans Paris, véhiculant poèmes et pamphlets, idées nouvelles surtout où bien des vérités sont mises à mal.. Les auteurs viennent tester leurs bonnes pages avant de les livrer à un public plus large, lecteur ou spectateur de théâtre. On se dispute sur un point de grammaire, on se détend en écoutant de la musique? On s'exerce à l'art de la pointe cher à Savinien de Cyrano qui s'y adonne dans ses Entretiens Pointus... L'un des habitués, Chapelain, raconte que l'on y parle savamment, mais on y parle raisonnablement, et il n'y a lieu au monde où il y ait plus de bon sens et moins de galanterie. Cathos et Magdelon s'abstenir !
Mais chut, on se prépare chez Clomire à lire le Discours sur le Tendre...
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Thomas SERTILLANGES
Lui écrire
Publié le 16 / 03 / 2005.
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