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Portrait d'Edmond Rostand

Programme de la Comédie Française de 1939

Hier, sur la scène de la Porte-Saint-Martin, devant le public transporté d'enthousiasme, un grand poète héroï-comique a pris sa place dans la littérature dramatique contemporaine ; et cette place n'est pas seulement l'une des premières parmi les princes du verbe lyrique, c'est la première... Quel triomphe en une soirée ! Il a l'idée frappée dans le métal sonore de l'expression ; il a l'image et l'imagination qui s'envolent comme un oiseau versicolore ; il a l'intelligence qui se communique à la foule par un verbe éclatant ; il a l'art dont les délicats sont ravis et charmés ; il a la force et la sensibilité, l'abondance et la variété, la fantaisie et l'esprit, l'émotion et l'éclat de rire, le panache et la petite fleur bleue. Il a la flamme, l'action et la virtuosité : il a 29 ans !


Certes pas à 29 ans sur cette photo...

Certes pas à 29 ans sur cette photo...
Ces lignes enthousiastes paraissaient dans l'Echo de Paris le 30 décembre 1897, sous la signature d'Henri Bauer. Comment ne les relirais-je pas aujourd'hui avec émoi pour tout ce qu'elles éveillent de souvenirs ?

Edmond Rostand fut, à la fin du siècle dernier, un beau miracle de la gloire. Du soir au matin, ce poète de vingt-neuf ans fut connu dans les deux mondes.

Cet homme jeune, élégant, marié à une femme d'une beauté enchanteresse, d'un délicieux talent, fut promu à une célébrité sans pareille. L'Europe, les Amériques se répétèrent son nom ; la Porte-Saint-Martin fut remplie chaque soir pendant des mois et des mois ; tous les comédiens révèrent de jouer ce Cyrano que Coquelin claironnait avec une maîtrise enivrée ; les amoureux de répétèrent la tirade des baisers, sur des terrasses,, au clair de lune ; et dans les lycées, nous apprîmes ces longs couplets qui jouaient comme Bainville avec les rimes et comme Hugo avec les sentiments.

Cette unanimité, cette belle contagion autour d'une ?uvre n'altérèrent point la fraîcheur et ce qu'il faut nommer la « gentillesse » d'Edmond Rostand. Je l'ai approché vers la fin du siècle, enfant devant la gloire : et je n'oublierai point son affabilité, son regard à la fois doux et perçant et ce dandysme à présent démodé, qui ne raidissait pas sa personne et fascinait mes jeunes années. Il savait vous demander des choses auxquelles il n'était point embarrassant de répondre : il s'amusait de tout, avec une spontanéité d'enfant. Une telle gloire, appuyée sur une réussite si complète ne pouvait pas ne pas soulever l'envie : il sut ne pas la voir ; et lorsqu'il eut peur de la sentir, il s'en éloigna dans la somptueuse solitude d'Arnaga.

Depuis quarante ans, on a épluché Cyrano et la poètique d'Edmond Rostand, on l'a comparée à d'autres expressions du génie français.

Mais il ne doit être jugé que dans sa lignée, celle qui débute dans notre littérature avec les grotesques chers à Théophile Gauthier et s'épanouit magnifiquement avec Victor Hugo. Cyrano de Bergerac a été, à la fin du XIXè siècle, le suprême écho du romantisme français au théâtre : c'est son mérite inaltérable.

Il a été également autre chose, et que Jules Lemaître a bien vu : une protestation inconsciente du talent contre certaines apparences de la scène. Le public de 1897 était las d'un théâtre dont l'audace réaliste tournait à la convention. Il souhaitait échapper aux monotonies de la comédie bourgeoise, des complications sentimentales et des adultères bien meublés. La verve héroï-comique de Cyrano se répandit comme un souffle tonique et bienfaisant. Nous y respirions un air de bravoure, que nous aurions tort de railler, fut-ce à distance, car nous en avons encore plus besoin aujourd'hui qu'en ce XIXè siècle finissant. Cyrano de Bergerac ne nous offrira pas, à présent, la seule saveur du souvenir ; il nous tournera vers quelques vertus traditionnelles de notre esprit.

La Comédie Française est fière et heureuse de l'inscrire enfin à son répertoire.




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Publié le 08 / 10 / 2007.


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